Hors-cadre : rêver du pays d’Othe

Paris, le 7 décembre 2016

Aujourd’hui, les transports en commun sont gratuits, le seuil de pollution est atteint et Paris veut favoriser le RER et le métro face aux déplacements en voiture. La foule est peu dense quand tous les portiques sont ouverts. Je suis mon parcours habituel de manière automatique et je me perds dans mes pensées. Je repense à quelques oeuvres de science-fiction. J’ai toujours aimé la science-fiction. Surtout ce personnage que l’on retrouve régulièrement, celui qui de par sa morale et son éthique dit non et échappe au système. Je m’identifie à lui, et j’aime à penser que j’agirai de cette façon, quel que soit le sujet abordé.

Il est question d’oligarchie et d’entreprises qui nous dirigent, nous connaissent dans le moindre détail parce que la finance est maître (Ares), de publicité et de communication qui nous ordonne d’obéir, de nous auto-formater et de suivre sans réfléchir (They Live), de pollution produite par l’homme qui ne fait qu’adapter son mode de vie pour rester dans sa bulle de confort sans limiter ses déchets (Wonderful Days). Il est question de fausses démocraties, de politiques politiciennes qui nous vident de sentiments car sans eux, nous sommes plus objectifs et ne pouvons recréer les horreurs du passé (Equillibrium), de robots qui prennent la place d’êtres humains et d’humains qui se déshumanisent (Ex Machina), de systèmes où les plus riches peuvent s’affranchir des contraintes naturelles (Gattaca), de sociétés où le passé, peu glorieux, est effacé des mémoires (Le Passeur), où les ressources manquent et où l’Homme joue de la science pour y trouver une solution (La Jetée).

Je passe le portique de Châtelet pour le RER B. En marchant, je me vois dans ces différentes époques futuristes, dans ces différents environnements et j’imagine mes réactions. Je me dis que moi aussi, ma morale et mon éthique me feraient abandonner tout cela pour créer mon monde. Mais voilà, ne sommes-nous déjà pas dans une de ces œuvres ? Voir dans toutes à la fois ? S’imaginer ses propres choix ne serait-ce pas une échappatoire au monde qui nous entoure ? Inutile de reprendre les thèses abordées, même si elles sont poussées à l’extrême, nous sommes dans un environnement semblable. Il y a toujours pire, et nous ne toucherons jamais le fond. Non pas parce que l’Homme n’est pas assez mauvais, mais parce que notre monde est comme un océan sans limite, toujours plus profond. Il y aura toujours quelqu’un, quelque chose en dessous de nous comme au-dessus. Le néant étant déjà une entité à part entière.

Aujourd’hui je ne veux plus choisir entre l’acceptation d’un système qui ne me convient pas, ou le refus de celui-ci. « Mais tu n’as pas le choix » me répondra-t-on. Et si l’on nous soufflait cette réponse ? Peu importe, aujourd’hui, je hack la Société. Parce que lorsqu’un système ne me convient pas, je ne le mets pas à la poubelle, je l’adapte, comme un bout de code, un réseau ou une machine qui ne répondrait pas à mes besoins. Non pas parce je suis plus intelligent que les autres, mais parce que je ne peux pas encaisser les défauts d’une société qui ne me convient pas. Alors avant même d’avoir essayé, j’abandonne et je choisi l’option cachée, je choisi de créer cette troisième option.

Je n’ai jamais compris ceux qui levaient la tête en se disant « qu’est-ce que je serai heureux si [place ton rêve ici] ». Moi je regarde les étoiles, en montagne (car c’est là qu’on les voit sous leur meilleur angle), avec mes amis, ma famille, accompagné d’une jolie fille, seule, à ma fenêtre, et je me dis que je n’ai pas besoin de chercher le bonheur. Le bonheur ne se trouve pas comme si l’on trouvait un ticket gagnant à l’Euro Million, il se crée, se martèle, se forge pour en faire notre modèle parfait, utopique. Je ne crois pas que le bonheur soit ce chemin que l’on parcourt et qui, sans jamais l’atteindre, nous rapproche de notre rêve. A défaut donc d’être Platonicien, je serai « Spinozien » : le bonheur, ce serait jouir de ce qu’il nous reste une fois ce dernier atteint. Aujourd’hui les choix que l’on me propose ne me vont pas, car je ne peux modeler mon bonheur avec, alors je m’en vais. Aujourd’hui j’emmerde la société. Aujourd’hui, accompagné ou seul, j’adopte la maison du Bailli.